mercredi 17 novembre 2010

Rencontres

Il y a de ces journées où l’énergie manque et où il faut beaucoup se pousser pour aller à son cours d’abdos, tout seul en plus parce que S. (mon gym partner italien) soutenait sa thèse le matin même. Bien m’en a pris car après, je suis allé à la piscine avec l’intention de faire quelques longueurs sous l’eau, relax. Et ce que j’imaginais vaguement sans trop y croire s'est produit. J’ai attiré l’attention d’un autre passionné d’apnée, M., sicilien d’origine, ravi de trouver un autre apnéiste à Chicago. Sans mauvais jeu de mots, le courant est tout de suite bien passé de sorte que nous allons nous entraîner ensemble, moi avec mes palmes, lui sans, puisqu’il a laissé son matériel en Italie. Décidément, moi qui ai vécu 10 ans dans la Petite Italie à Montréal sans jamais me faire de pote italien, voilà que j’en rencontre deux par hasard en quelques semaines. Mais bon, vous allez me dire, quoi d’étonnant dans la ville d’Al Capone?

Quoi qu'il en soit, une première retombée positive à cette aventure à Chiacago, ce sont les rencontres qu’elle m’amène. Je dis bien « rencontres », et pas forcément « nouveaux amis » ou connaissances, car plusieurs de ces personnes venues d’ailleurs et nouvellement entrées dans ma vie vont quitter définitivement Chicago le mois prochain. Leur séjour ici s’achève tandis que le mien commence. Ce n’est pas le cas de tous, heureusement. Et notamment de ce cercle latino-américain que je commence aussi à fréquenter, composé entre autres de Colombiens (J., sa femme et des amis à eux) et d’un Uruguayen, A., également ami de J. (ils se sont connus au stage d'immersion des boursiers Fullbright à Philadelphie). Tous sont arrivés ici pratiquement en même temps que moi, qui pour faire sa maîtrise, qui son doctorat. C’est drôle, je m’étais justement dit que ce serait bien que je profite de mon séjour à Chicago pour raffraîchir mon espagnol, appris à l’école il y a bien longtemps et très vite oublié. Pourquoi Chicago? Parce que beaucoup de Mexicains y vivent et qu’on y parle espagnol partout.

Pour en revenir à ces rencontres qui me font justement penser au film L’Auberge espagnole, ce qui me frappe, c’est la proportion de ces étudiants-voyageurs qui n’ont aucune intention de retourner vivre dans leur pays d’origine, sans vouloir nécessairement rester aux États-Unis. Ainsi, M., en échange ici pour quelques mois (il termine une école d’ingénieur), n’a que du mépris pour les résidents de sa Sicile natale, qu’il a déjà quittée il y a deux ans pour Turin. Il est hors de question pour lui de retourner vivre en Italie. Mais il n’envisage pas non plus de faire sa vie aux États-Unis, pays dont il ne supporte pas le nombrilisme, le mode de vie consumériste, et l’absence de conscience écologique (comme moi, il est scandalisé par l'absence de recyclage à Chicago... j'y reviendrai). Et puis, habitué depuis son plus jeune âge à passer sa vie dans l’eau, la mer lui manque. Il envisage donc l’Australie, mais donne une chance à San Francisco, où il s'apprête à passer un mois, pour voir. C'est la seule ville américaine, dit-il, où il pourrait peut-être se retrouver. Chicago l’a déçu. Comme W., un autre « J1 » rencontré à la « réunion d’orientation » obligatoire des stagiaires étrangers, il espérait une vie sociale plus trépidante du fait qu’il avait choisi d’habiter les résidences étudiantes. Paradoxe : alors qu’il s’attendait à une vie de bringue, ses « room mates » sont si studieux qu’il n’a presque pas de contacts avec eux. Je m’étonne de ce contraste avec ma propre expérience. Je me demande si ma vie québécoise n’est pas pour beaucoup dans cette intégration jusqu’ici plus facile.

Mi-novembre déjà. Lentement mais sûrement, le temps gris et pluvieux s’installe. Les magasins mettent leurs vitrines et leur musique d’ambiance à l’heure de Noël. C’est aussi le temps des publicités pour le flu shot. Imaginez : vous faites vos courses dans votre supermarché favori. Entre le rayon des légumes et celui des alcools, vous passez par la pharmacie intégrée au magasin. Vous remplissez un questionnaire médical, vous passez à la caisse et payez 26,99 $, et hop! La pharmacienne vous injecte sur place votre vaccin contre la grippe. Ça n’a pas pris plus de dix minutes. Et en prime on vous remet des échantillons gratuits. Vous pouvez maintenant vous rendre à la caisse self-service pour régler vos autres achats. L'Amérique, c'est aussi cela: payez et obtenez ce que vous voulez, tout de suite. À condition bien sûr que ça s’achète, pour paraphraser le slogan d'une carte de crédit bien connue.

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